Exposition {∅}
Luc de Banville – Loïc Le Dantec – Francis Violette
du 29 novembre au 12 janvier 2019
Galerie Grand E’terna
3 Rue de Miromesnil
75008 Paris
Du lundi au samedi
de 11h à 13h et de
14h à 19h
et sur rendez-vous
Vernissage le jeudi 22 novembre à 18h30
contact : 01-42-65-14-46
Une plage hachurée
Francis Violette, Luc de Banville et Loïc Le Dantec tentent de sonder ce que l’on nomme difficilement : l’espace, la forme et le vide. Leurs vocabulaires formels empruntent autant d’éléments aux systèmes mathématiques, qu’aux stratégies visuelles de l’architecte ou de l’astronome. Ils puisent dans le plan, l’axiome et l’échelle des outils qui se posent comme des tentatives de magnifier, de délimiter voire de dominer ces interstices. Ces constructions occupent l’espace comme des anomalies, des excroissances matérielles subvertissant les repères schématiques du quadrillage de dessin ou de l’équilibre sculptural.
En mathématiques, l’ensemble vide – noté {∅} – est celui qui ne contient aucun élément. L’ensemble vide ne contient rien, mais étant un ensemble, il n’est pas rien. Aussi, il recèle lui-même son sens muet, bien que infiniment discernable. Cette autosuffisance conceptuelle offre des prismes pour penser la rupture qui, dans les mots de Sylvie Castets, « s’opère entre la représentation et le fait de présenter […], offrant au spectateur un lieu milieu, dans lequel il est amené à s’affranchir de ces modèles. L’oeuvre est donc un seuil qu’il faut « traverser pour apprendre la solitude. » (Serres). Elle vibre d’instabilité et cristallise l’état singulier du changement. Enfin, elle conduit inéluctablement vers un devenir autre. »*
Néanmoins, ces moyens sont limités par leur nature technique, et ne sauraient oblitérer la force d’abstraction qui se déploient dans les œuvres. On se retrouve face à une tension, un conflit irrésolu entre intérieur et extérieur, essai et erreur, construction et délitement. Là où la ligne s’arrête, commence la nuée.
Dans la série de Francis Violette, volumes et entrebâillements composent des représentations sensibles d’une matière en mouvement, une tache aléatoire qui trouble le patron de l’image en se fondant avec le vide environnant.
Loïc Le Dantec, lui, nous montre le processus de conception de ses « pions », du squelette sous-jacent de la figure au relief énigmatique de la surface. Ce processus distend la dichotomie entre l’intérieur voué à disparaître et l’extérieur, unique appréhension possible de l’oeuvre.
Les pièces tridimensionnelles de Luc de Banville, faites de métal et de papier, abstraient la matière de tout statisme pour faire du mouvement une énergie projetée. Ainsi, les écailles se métamorphosent en feuilles, puis en plumes, la forme s’élève et se tord au gré de mutations imaginées.
Loin
des prétentions théorématiques, les œuvres s’appréhendent
davantage comme un espace imperceptible, un inframince
entre le
matériau tenu aux lois physiques et géométriques qui le
conditionnent et le produit fini, lui aussi traversé par les mêmes
phénomènes mais renfermant le désir de s’en émanciper. Cette
trace, prenant la forme d’un trait, d’un relief ou encore d’une
ombre, porte les stigmates d’une biographie accidentée.
*Sylvie Castets, « De Masaccio à Stalker : pour une esthétique du seuil et de son franchissement », Conserveries mémorielles [En ligne], #7 | 2010, mis en ligne le 10 avril 2010.